Une croissance sous le signe de l’enthousiasme : les entreprises belges visent haut
» Les entreprises belges, qu’il s’agisse de jeunes entreprises en pleine croissance ou de valeurs établies, font preuve d’une ambition remarquable malgré les obstacles structurels
» La croissance n’est pas un luxe, mais une nécessité : pour les sociétés cotées en bourse, la croissance est essentielle pour attirer les investisseurs
Ambition, en dépit des obstacles
Malgré une longue liste de griefs, comme la pénurie de sites industriels, l’excès de bureaucratie, une mentalité NIMBY (Not In My Back Yard – Pas dans mon arrière-cour) persistante, des coûts de main-d’œuvre élevés et une énergie coûteuse, notre pays compte de nombreuses entreprises qui débordent d’ambition. Parmi les acteurs traditionnels figurent les « producteurs de pommes de terre » Agristo et Clarebout, ainsi que le groupe alimentaire Puratos. Parmi les start-ups, nous pouvons citer des noms tels que Lighthouse, Odoo et Team.blue. Il ne s’agit que de la pointe de l’iceberg. Cependant, ces entreprises tendent à se tenir à l’écart de la Bourse de Bruxelles. Pourtant, les investisseurs les accueilleraient à bras ouverts. En effet, pour les sociétés cotées en bourse, la croissance est un must. Pratiquement toutes les entreprises nourrissent cette ambition, mais l’exécution fait parfois défaut. Cela est particulièrement vrai pour les entreprises ayant un profil cyclique.
Plans ambitieux, revers mineurs
Par exemple, Bekaert avait annoncé en 2021 des plans de croissance robustes : un chiffre d’affaires de 5 milliards d’euros et une marge d’exploitation de 8 à 10 %. Mais l’entreprise s’est rapidement heurtée à la réalité économique. Dans le climat actuel, même une croissance organique de 3 % est un exploit. Pour ce qui est des acquisitions, on en reste, pour l’heure, au stade des intentions. En novembre 2023, Melexis avait annoncé des objectifs ambitieux d’ici 2030 : une croissance annuelle composée du chiffre d’affaires de 10 % pour le secteur automobile et de 15 % pour les divisions auxiliaires. Cependant, en 2024, Melexis a connu sa première contraction des ventes (-3 %) après plusieurs années fastes. Une recul encore plus prononcé est attendu cette année (-11 %). Toutefois, la direction maintient ses objectifs à long terme. C’est pourquoi la société investit dans une nouvelle usine d’essai en Malaisie et dans la recherche et le développement. Car l’innovation est et reste le seul moyen de survivre dans un monde hyperconcurrentiel.
Du BHAG au marché de la bière : qui ose gagne
La société EVS nourrit également une ambition de croissance exceptionnelle. Elle a formulé un BHAG (Big Hairy Audacious Goal ou Objectif audacieux et ambitieux), à savoir être le numéro un dans le monde dans son secteur d’ici 2030. Tout le monde dans l’entreprise est conscient de cette ambition. Grâce à ses investissements dans la recherche et le développement et à des acquisitions ciblées, EVS construit son avenir, étape par étape. Elia Group s’y attaque à une bien plus grande échelle. D’ici 2028, le groupe prévoit d’investir pas moins de 31,6 milliards d’euros dans ses réseaux de transport en Belgique et en Allemagne. Elia se développe également aux États-Unis. Ce faisant, la société vise délibérément un horizon au-delà de son marché domestique saturé et déploie son expertise accumulée à l’échelle internationale. Elia a récemment mobilisé 2,2 milliards d’euros lors d’un tour de table, ce qui a immédiatement attiré des investisseurs de renom. Avec une capitalisation boursière dépassant désormais les 10 milliards d’euros, l’action est également dans le point de mire des grands fonds d’infrastructures. Le Jensen-Group est un fleuron industriel de taille plus modeste. Grâce à ses solutions hautement automatisées, souvent dotées de robotique et d’intelligence artificielle, le groupe s’est converti en un leader mondial des systèmes de blanchisserie industrielle. Les acquisitions et les alliances stratégiques agissent comme des accélérateurs de la croissance.
AB InBev, qui contrôle plus d’un quart du marché mondial de la bière, aspire à lever son verre plus souvent à l’avenir. Les réjouissances sont encore modestes pour l’instant : le marché mondial de la bière connaît une croissance très limitée. Toutefois, le flux de trésorerie d’AB InBev est en hausse depuis plusieurs trimestres. En réalisant des investissements ciblés dans le marketing numérique, l’entreprise renforce sa position sur le marché.
La société Lotus Bakeries est de loin la championne de la croissance en Belgique et il semble qu’elle va conserver ce rôle dans les années à venir. Son chiffre d’affaires a progressé au cours des quinze dernières années à un taux de croissance annuel composé de 11,6 %, tandis que sa marge BAIIA est restée relativement stable autour de 20 %. Lotus dispose de sites de production efficaces en Belgique, en Afrique du Sud et aux États-Unis, et construit actuellement une nouvelle usine en Thaïlande. En outre, des investissements importants sont consacrés au développement de la marque, car l’entreprise détecte de nouvelles opportunités de croissance pratiquement sur tous les continents.
La croissance implique aussi une évolution
Les sociétés belges cotées en bourse se distinguent grâce à leurs équipes de direction fortes, leurs solides réserves financières et leur saine gouvernance d’entreprise. Elles font preuve d’une ambition remarquable. Les investissements dans l’innovation, le développement des marques et de nouvelles capacités de production sont nombreux, même s’il est rare que de nouvelles usines soient encore construites en Belgique. Sur le plan des acquisitions, les sociétés belges sont aussi plus actives que jamais. Il suffit de penser à Ageas, EVS, Fagron, DEME et KBC.
Leur volonté de passer à l’échelle supérieure, dans le but d’attirer davantage d’investisseurs internationaux, est tout aussi importante. Elia a particulièrement bien réussi à cet égard. Aedifica s’y essaie, avec Cofinimmo, et WDP a considérablement élargi son portefeuille français. Elle vise une échelle paneuropéenne, avec un portefeuille de plus de 10 milliards d’euros. Une entité de plus grande envergure jouit de davantage de liquidités, d’un meilleur accès aux marchés de capitaux et d’une diversification géographique et locative.
Oser, agir, grandir
Les défis sont innombrables pour les entreprises belges, mais les opportunités le sont tout autant. Celles qui misent sur l’innovation, la mise à l’échelle et la présence internationale contribueront au prochain chapitre de notre histoire économique. La croissance est là, parfois fragile, souvent impressionnante et surtout : elle provient d’entreprises qui osent rêver et qui passent à l’action.